Naren, enfant des bidonvilles

Quand le téléphone a sonné il devait être 7 heures du matin. Au bout du fil, le père de Naren qui m’appelle du bidonville : ‘ Naren vient d’ avoir eu la nuit derniere un accident en travaillant dans les rues’.

Naren, un jeune garçon de 14 ans fait parti des centaines d’ enfants extrêmement pauvres a Phnom Penh, qui pour survivre, sont forcés par leur parents a marcher des heures le long des rues de la capitale pour récupérer dans les tas d’ ordures, des bouteilles plastiques, du carton, des cannettes…et gagner un peu d’argent en revendant leurs collectes a un centre de tri.

Les plus pauvres, certains âgés de 4 ou 5 ans, ne sont munis que d’un grand sac qu’ils portent sur leur dos. D’autres tirent une charrette. Et les autres un peu plus fortunés tirent leur charrette à vélo ou en mobylette.
Le père de Naren gagne un peu d’argent grâce a sa vieille table de billard chez lui, ou viennent jouer des jeunes du quartier.
Naren a 7 frères et sœurs. Leur maman est partie pour la Thaïlande après en avoir eu assez de son mari alcoolique qui l’a frappait.
‘’ Ou est Naren ? ’’ Je demande au téléphone
‘’ Ici avec moi dans le bidonville’’ me répond le père.
Je saute dans la voiture pour le bidonville de Bong Tampon situé à moins de 10 minutes de chez moi.

Bong Tampon est l’un des derniers bidonvilles à Phnom Penh. Ces dernières années de nombreuses communautés pauvres ont été chassé de la ville. Parfois leurs demeures de fortune en tôles et en planches ont été entièrement détruites par des incendies. Des hommes haut placés et corrompus ont pris le terrain pour y construire de belles villas ou de grands bâtiments.

Des milliers de familles ont ainsi été chassées et forcées à vivre a des kilomètres de Phnom Penh dans ce qui ressemble a des camps de refugiés. Je me demande encore combien de temps avant que le même sort tombe sur les familles de Bong Tampon.
Naren, comme tout le monde au bidonville vit dans un petit espace délabré de quelques mètres carrés ou l’on trouve des rats et des insectes de tous genres. Au bidonville il n’y a pas d’eau potable. Les toilettes ne fonctionnent plus. Il y a toutefois une petite église (la plus petite que je connaisse !) qu’un missionnaire coréen a ouvert il y quelques années.
Je sors de la voiture et me rends a la ‘maison’ de Naren. Le garçon est allongé sur un lit, en boule, les yeux fermés. Son visage balafré.
‘ Qu’est – ce qui s’est passé ?’ Je demande aussitôt‘.
’ Hier soir tard, me raconte le papa, mon fils se trouvait avec son grand frère à fouiller dans les ordures quand soudain une camionnette fonce sur la petite charrette. Naren a été jeté sur la route et a perdu conscience’.
Le chauffeur de la camionnette évidement ne s’est pas arrêté (c’est malheureuse souvent le cas au Cambodge). Le frère de Naren réussi t, tant bien que mal a ramené son jeune frère au bidonville.
‘ Mais dans cet état, il pourrait mourir de ses blessures !’ Je me presse de dire au père.
Nous portons Naren dans ma voiture pour le conduire a une clinique que je connais bien, non loin de la. Son corps est comme sans vie. Le médecin craignant un traumatisme crânien propose de l‘ emmener dans une autre clinique, a l’autre bout de la ville, pour une radio. Quelques minutes plus tard, le frère de Naren et moi-meme, nous retrouvons avec Naren dans une ambulance, les gyrophares allumées. Je ne me souviens pas d’avoir traversé Phnom Penh en si peu de temps !
Naren se réveille tout doucement. Ses yeux lui faisant si mal qu’il ne peut pas les ouvrir entièrement. Il n’est pas vraiment conscient de tout ce qui se passe autour de lui. Je me tourne vers lui et je lui dis : ‘Si tu pouvais voir ce que je vois ! Toutes les voitures, même les grosses voitures de luxes nous ouvrent la voie ! Comme si on se trouvait dans la voiture du Premier ministre !’’
Les ambulanciers transportent Naren dans la salle de radiographie. Une heure plus tard une jeune infirmière me donnent les résultats du scanner : ‘’ Pas de lésions internes’’. Dieu soit loué !

Au retour dans l’ambulance, je ressens une profonde colère. En colère contre ce système du travail forcé des enfants. En colère qu’un enfant doit se rendre toutes les nuits, travailler comme un esclave pour moins d’un euro par jour. En colère de voir un si grand nombre de garçons et de filles tous les jours au milieu de montagnes d’ordures ou se dégagent une odeur à vomir alors qu’au même moment des hommes et des femmes construisent d’immenses villas et conduisent les plus grosses et les plus belles voitures qui soient.
Naren est toujours allongé dans l’ambulance. Je lui prends la main et lui dis : ‘Naren, je vais te faire une promesse : Tu ne retourneras plus jamais a travailler a la rue !’
Il ne savait pas encore ce que j’avais en tête. Quelques jours plus tard, le père de Naren signait une lettre promettant qu’il n’enverrait plus jamais son fils à la rue et lui permettrait d’aller tous les jours à l’école. En échange, la famille recevra le même montant (25 euros par mois) que gagnait Naren en travaillant. Le moment ou le père de Naren a signée le contrat un nouveau chapitre s’ouvrait pour son fils. Un chapitre de restauration et d’espoir.
Depuis ce jour, Naren n’est plus retourné à la rue. Tous les jours il étudie à une petite école chrétienne à deux pas de chez lui. Il s’est même inscrit pour apprendre l’anglais et l’informatique.

Tous les quinze jours, le samedi soir, Naren et quelques 30 autres jeunes du bidonville rejoignent la Rencontre de jeunesse à la grande église Vie Nouvelle de Phnom Penh. A peine le groupe de louange ait commencé à jouer de leurs instruments, vous trouverez tout devant, debout, les bras levés vers Dieu, un jeune garçon. Un jeune garçon qui au lieu de se trouver a la rue, se trouve dans une église à chanter sa joie en Jésus. ( je crois qu’ il chante plus fort que tous les autres !)
Naren m’a dit que cela faisait déjà 2 ans qu’il connaissait Jésus comme son Sauveur.
Quand il sera plus grand il voudrait être architecte.

Je lui ai demandé il y a un mois : ‘Que voudrais- tu que le Seigneur fasse pour toi ? ’
‘ Qu’il permette a maman de revenir au Cambodge et que mes parents, mes frères et sœurs puissions être de nouveau une famille’.

Il y a 3 semaines, sa maman est revenue de Thaïlande. La semaine dernière le père et la mère se tenaient par la main et donnaient tous les deux leur vie a Dieu. Dimanche dernier, Naren et ses parents se trouvaient ensemble, au culte.
Dieu est bon !

Timothée Paton

Phnom Penh, juin 2010
‘ The Bong Paoun Project ’ est un nouveau ministère auprès des enfants des rues a Phnom Penh dans le cadre de I.C.A., l’église internationale des Assemblées de Dieu au Cambodge. www.timpaton.info

Vous avez aimé ? Partagez autour de vous !


Ce texte est la propriété du TopChrétien. Autorisation de diffusion autorisée en précisant la source. © 2022 - www.topchretien.com
18 commentaires
  • DIEUESTAMOUR1 Il y a 8 années, 6 mois

    Comme Dieu est bon!
  • Laurence Il y a 12 années, 9 mois

    Magnifique témoignage ! C'est très émouvant de voir la manière dont le Seigneur accomplit ses desseins dans la vie d'une famille. Je lui rends grâces, je sais que le peuple cambodgien a terriblement souffert et je me réjouis de l'existence de cette petite église au sein d'une si grande souffrance.
  • elie pascal Il y a 12 années, 11 mois

    merci Timothee pour ce temoignage puissant;mes larmes ont coulé,de voir la detresse de ces enfants ,de ces familles;mais combien Dieu est est grand ; l'oeuvre qu'il accomplit au sein de ces mal aimés,est extraordinaire; c'est là qu'on voit que Dieu est réellement vivant;que Dieu te bénisse Timothée Paton
  • Afficher tous les 18 commentaires